La campagne de Pologne

Pologne, 1er septembre 1939 – 5 octobre 1939
La marche vers la guerre
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, dans le but de donner un débouché sur la mer à la Pologne, le traité de Versailles avait créé un couloir et une ville internationale libre, Dantzig, qui séparaient l’Allemagne de la Prusse-Orientale. À Dantzig, le pouvoir exécutif était confié au président du Sénat ; y siégeait également un parlement et un haut-commissaire de la SDN. La Pologne y maintenait un commissaire général et formait une union douanière avec la ville, zone franche administrée par le Conseil du port, avec libre transit pour les cargos et les chemins de fer polonais. Sa population, majoritairement allemande, avait fait de Dantzig un foyer de tension entre l’Allemagne et la Pologne.
En 1933, quand Hitler arriva au pouvoir, la Pologne, craignant pour la sécurité de Dantzig, rétablit sa police portuaire, qui occupait la forteresse de Westerplatte. Mais, elle dut la dissoudre après que la SDN l’ait accusé de violer l’accord de 1921. Au cours des élections de mai 1933 à Dantzig, les nazis triomphèrent et nommèrent à la présidence du Sénat le nationaliste Hermann Rauschning, qui tenta, sans succès, d’établir des relations diplomatiques avec l’Union soviétique. Il fut remplacé l’année suivante par le nazi, Arthur Greiser. En janvier 1934, l’Allemagne et la Pologne signèrent un pacte de non-agression valable 10 ans. Au début de l’année 1939, Hitler se rendit à Dantzig où il fut accueilli par une population enthousiaste majoritairement allemande, et promit sa réintégration au sein du IIIe Reich.
En mars 1939, après avoir annexée l’Autriche et le territoire des Sudètes, l’Allemagne occupait la Bohême et la Moravie. Hitler réclamait désormais Dantzig et son corridor. Tout au long de l’hiver 1938-1939, Hitler avait essayé de persuader les Polonais de les laisser disposer de ces territoires. En vain. En guise d’avertissement, le 22 mars, les Allemands occupèrent la vieille cité germanique de Memel, attribuée à la Lituanie en 1919, et forcèrent les Lituaniens à signer un traité leur cédant la ville. Mais, le gouvernement polonais demeura intransigeant. Le 28 mars, il annonça que toute action unilatérale modifiant le statut de la ville libre de Dantzig conduirait à la guerre. Fin mars 1939, la Grande-Bretagne et la France, décidées à ne plus rien céder au gangster de Berlin, apportèrent leur soutien à la Pologne : la France en signant un pacte d’assistance et la Grande-Bretagne, un accord économique.

En avril 1939, Hitler prononça un violent discours devant le Reichstag dans lequel il dénonçait le traité germano-polonais de non-agression de 1934 en exigeant la restitution de Dantzig, ainsi que la construction d’un chemin de fer et d’une route au statut extraterritorial traversant le couloir qui séparait la Prusse-Orientale du IIIe Reich. En échange, il offrit à la Pologne de reconduire pour 25 ans le pacte de non-agression de 1934, ainsi que de l’intégrer dans le pacte anti-kommintern tout en lui assurant la pérennité de ses frontières. Les propositions de Hitler furent une fois de plus rejetées par la Pologne.
Les concessions franco-britanniques de Munich laissèrent penser à Hitler qu’il pourrait envahir la Pologne sans risque de guerre. Le 23 mai, il annonça à ses chefs militaires sa décision d’attaquer la Pologne afin d’étendre l’ « espace vital » de l’Allemagne. Le 17 juin, dans la ville libre, Goebbels prononça un violent discours anti-polonais. Les Allemands tentèrent d’empêcher les gardes et douaniers polonais de faire leur travail. Józef Beck les menaça alors de représailles économiques. Arthur Greiser riposta le 29 juillet en déclarant que la police de Dantzig ne respectait plus son autorité et qu’elle devait se retirer immédiatement. En août, Józef Beck confirma le rejet des propositions allemandes concernant Dantzig et son corridor.
Le 23 août 1939 au soir, un pacte de non-agression fut signé entre l’Allemagne et l’Union soviétique ainsi qu’un protocole secret plaçant tous les États baltes (sauf la Lituanie), la moitié orientale de la Pologne et la province roumaine de Bessarabie dans la sphère d’influence soviétique. Le reste de l’Europe orientale revenait à l’Allemagne. La Pologne était maintenant encerclée par deux puissants ennemis qui venaient de se réconcilier. Sa situation était critique.
Pour prétexter l’invasion de la Pologne, Reinhard Heydrich, chef du R.S.H.A., eut l’idée de simuler des attaques de guérilleros polonais. L’une de ces attaques devait avoir lieu dans les casernes des gardes forestiers près de la ville de Pitschen, l’autre à la station de radiodiffusion de Gleiwitz, d’où serait émis un communiqué incitant à la rébellion en Haute-Silésie. Un groupe de policiers allemands fut sélectionné et entrainé pour jouer le rôle des guérilleros polonais.
Hitler fixa la date d’invasion de la Pologne, baptisée opération Fall Weiss, au 26 août, à 4h30. Le 22 août, il convoqua ses généraux et leur affirma que la Grande-Bretagne était si occupée en Méditerranée, au Moyen et en Extrême-Orient qu’il était peu probable qu’elle intervînt. Le pacte avec la Russie l’avait littéralement désarmé. Hitler pensait que les Français et les Britanniques n’entreraient pas en guerre pour la Pologne. Il craignait seulement qu’un État ne tentât de nouveau une médiation. Les jours suivants devaient lui donner tort en ce qui concerne l’attitude de la France et de la Grande-Bretagne.
Le 25 août, à 15 heures, Hitler devait donner confirmation de l’ordre d’attaquer. La confirmation fut donnée, mais deux événements inattendus se produisirent alors. À 16h30, il apprit qu’une alliance anglo-polonaise obligeant les Anglais à intervenir, avait été signée. À 18h, Mussolini informa Hitler que l’Italie ne pouvait pas soutenir l’Allemagne sans l’aide matérielle de celle-ci. Les Italiens exigeaient pour pouvoir intervenir une aide exorbitante, bien au-dessus des moyens de l’Allemagne et que cette dernière ne pouvait accorder. L’ordre d’attaquer fut alors reporté et les forces allemandes regagnèrent leurs positions de départ. Mais, il était trop tard pour avertir les hommes d’Heydrich, qui se trouvaient déjà sur le territoire polonais. Conformément aux instructions, ces derniers engagèrent une fusillade contre la douane de Colinden, avant de finir par recevoir le message indiquant l’ajournement de l’opération.
Les Polonais avaient remarqué les mouvements des troupes allemandes le long de la frontière. Le gouvernement profita de ce délai pour ordonner la mobilisation générale le 30 août. Toutes les formations aériennes polonaises quittèrent leurs bases pour les terrains opérationnels tandis que les unités navales reçurent l’ordre de se diriger vers les ports britanniques. Entre-temps, les forces allemandes reçurent l’ordre de se tenir en alerte et prêtes à attaquer le 1er septembre, à 4h45.
Opération Fall Weiss
Le plan d’attaque allemand visait à envahir par surprise le territoire polonais pour empêcher toute tentative de mobilisation et de concentration de l’armée polonaise, et à détruire le gros de son armée, situé à l’ouest de la ligne Vistule-Narew, par deux attaques convergentes, l’une venant de Silésie et l’autre de Poméranie et de Prusse-Orientale. Pour cette opération, les Allemands disposaient d’un Groupe d’armées Nord et d’un Groupe d’armées Sud.
Le Groupe d’armées Nord, sous les ordres du général von Bock, comprenait la IIIe et la IVe armée. Il avait pour mission d’établir la communication entre l’Allemagne et la Prusse Orientale, et, à partir de cette dernière, de progresser vers Varsovie pour couper l’ennemi au nord de la Vistule. Le Groupe d’armées Sud regroupait les VIIIe, Xe et XIVe armées et était placé sous les ordres du général von Rundstdedt. La Xe armée, venant de Silésie, devait attaquer en direction de Varsovie, entre Zawiercie et Wieluń, afin de contrôler les passages de la Vistule, et, avec le Groupe d’armées Nord, détruire les poches de résistance en Pologne occidentale. La XIVe armée renforcerait le flanc droit de cette attaque tandis que la VIIIe armée protégerait le flanc gauche entre Poznań et Kutno. De son côté, la Luftwaffe détruirait l’aviation polonaise, disloquerait les liaisons ferroviaires et appuierait les troupes au sol. Sur mer, la Kriegsmarine assurerait la libre utilisation des routes maritimes vers la Prusse-Orientale et bloquerait le golfe de Dantzig.
Le plan d’attaque des Allemands était audacieux. La Xe armée devait progresser vers Varsovie, distante d’environ 270 km, sans tenir compte de ses flancs ni de ses arrières. Elle anéantirait rapidement les défenses polonaises à l’ouest de la Vistule, empêchant ainsi les Polonais de se retirer derrière le fleuve pour organiser une nouvelle ligne de résistance. Au même moment, des attaques ayant pour but de retenir l’ennemi seraient lancées depuis la Slovaquie, la Poméranie et la Prusse-Orientale. Le succès de cette opération reposait sur la rapidité des Allemands à coordonner toutes leurs forces. La présence de puissantes forces françaises à l’ouest exigeait que l’offensive fût rapide et décisive.
Le plan de défense polonais
En temps de paix, l’armée polonaise comprenait 30 divisions d’infanterie, 12 brigades de cavalerie, 2 brigades motorisées et un certain nombre d’unités du génie, d’artillerie, de chars et de transmissions. Elle possédait environ 250 chars dont seule une centaine pouvait être considérée comme efficace. Les autres se révélaient obsolètes. L’artillerie était inférieure à celle des Allemands, aussi bien numériquement que qualitativement. Les forces aériennes rattachées à l’armée comptaient 15 escadrilles de chasse, 12 groupes de bombardiers de reconnaissance, 4 escadrilles de bombardiers et 12 escadrilles de liaison, soit un total de 210 bombardiers et bombardiers en piqués et 150 chasseurs. Ces appareils étaient considérés comme dépassés et ne faisaient pas le poids face à la Luftwaffe. La marine polonaise se limitait à 4 destroyers, 5 sous-marins, 2 canonnières, 1 mouilleur de mines et 6 dragueurs de mines. Il y avait aussi les corps de défense frontalière (KOP), chargés de protéger la frontière orientale, et la « défense nationale », composée de réservistes et d’hommes n’ayant pas atteint l’âge de la conscription. L’armée active atteignait des effectifs s’élevant à environ 370 000 hommes et les réserves, 2 800 000 hommes.
À la mobilisation, l’infanterie devait passer de 30 à 39 divisions tandis que les autres unités devaient être renforcées. Il était également prévu que les forces aériennes polonaises soient divisées en une brigade de bombardiers et une brigade de chasseurs. Tout avis de mobilisation pouvant servir de prétexte à une invasion allemande, les trois quarts des forces polonaises devaient se présenter à leurs centres de recrutement par appel individuel dans les 72 heures. Les autres devaient être convoqués par voie d’affiches. Ainsi, la mobilisation s’avéra très lente, de sorte que 20 % des réservistes n’atteignirent jamais leurs unités de destination.

Devant le risque d’attaque de la part des Allemands, les Polonais avaient établi un plan de défense ayant pour but d’éviter la destruction des unités polonaises avant l’offensive des Alliés à l’ouest en infligeant le plus de pertes possible aux Allemands, en défendant certaines zones indispensables à la conduite de la guerre et en exploitant toutes les occasions de contre-attaquer avec leurs réserves. Ils décidèrent d’appliquer, pendant la première phase de la campagne, une technique défensive mobile qui leur permettrait le maintien d’un front de défense ferme sur les fortifications proches de la frontière. En ce qui concerne l’aviation, la brigade de bombardiers avait pour objectif d’attaquer les troupes allemandes et leurs voies de communication. La brigade de chasseurs devait assurer la défense contre les attaques aériennes.
L’agression
Dans la nuit du 31 août, les hommes d’Heydrich pénétrèrent en Pologne, et occupèrent la station de radiodiffusion de Gleiwitz. Le 31 août, à 20h12, ils émirent un communiqué en Polonais puis quittèrent les lieux. Peu de temps après, la Gestapo déposa un cadavre à l’entrée de l’édifice, preuve évidente de l’attaque. Heydrich savait que la station de radiodiffusion de Gleiwitz était reliée à l’importante station de Wrocław. Il pensait que le communiqué serait ainsi entendu dans une grande partie de l’Allemagne. Mais, la liaison était établie dans un seul sens et uniquement afin que Gleiwitz puisse transmettre le programme de Wrocław et non l’inverse. Le message ne fut alors diffusé que dans les environs de Gleiwitz. La supercherie fonctionna malgré tout.
La campagne de Pologne débuta le 1er septembre, à 4 heures du matin. Le vieux cuirassé allemand Schleswig-Holstein ouvrit le feu sur le fort de Westerplatte, près de Dantzig. Peu de temps après, les bombardiers et les chasseurs allemands franchirent la frontière et attaquèrent systématiquement les aérodromes, les avions, les réseaux routiers et ferroviaires, les centres administratifs et industriels, les concentrations de troupes… En moins de deux jours, la supériorité aérienne sur la Pologne ne fit plus de doute et la Luftwaffe put se cantonner dans son rôle tactique de bombardement concentré à l’avant des premières colonnes de chars. L’offensive terrestre fut lancée peu avant 5 heures du matin. Peu après, Hitler annonça à la radio que l’Allemagne avait été attaquée par les Polonais et qu’elle répondait à la violence par la violence. Le lendemain, le gouvernement de Dantzig déclara officiellement : « Dantzig est une ville allemande et souhaite appartenir à l’Allemagne ».

L’invasion allemande de la Pologne mit fin à tout espoir de paix avec la Grande-Bretagne et la France. Le soir du 1er septembre, à 21h30, von Ribbentrop reçut l’ambassadeur anglais Henderson. Ce dernier lui remit une note : « … Si le gouvernement de Sa Majesté ne reçoit du gouvernement allemand aucune assurance satisfaisante que le gouvernement allemand arrête ses opérations agressives et qu’il est prêt à retirer ses troupes du territoire polonais, le gouvernement de Sa Majesté remplira sans hésiter ses obligations envers la Pologne. » Une demi-heure plus tard, l’ambassadeur français, Coulondre, se présenta à son tour avec une note. La même, ou presque. Le lendemain, les radios alliées annonçaient la mobilisation générale. Le 3, à 9 heures du matin, Paul Schmidt, l’interprète officiel allemand, reçut de nouveau Henderson. Ce dernier lui remit un ultimatum de la part du gouvernement britannique : « Plus de vingt-quatre heures se sont écoulées depuis qu’une réponse immédiate à l’avertissement du 1er septembre a été réclamée, et les attaques contre la Pologne ont encore été intensifiées depuis. Si le gouvernement de Sa Majesté ne reçoit pas avant 11h des assurances satisfaisantes sur la cessation de toutes les actions agressives contre la Pologne et sur le retrait des troupes allemandes du territoire de ce pays, l’état de guerre existera à partir de ce moment entre la Grande-Bretagne et l’Allemagne. » Quelques minutes plus tard, Coulondre apporta le même message.
Le fort de Westerplatte, défendu par 200 hommes, abritait un véritable arsenal. L’attaque du fort devait être menée par le 3e bataillon du régiment SS-Totenkopf, soutenu par 500 volontaires de la ville de Dantzig. Il était prévu qu’une unité de marine les rejoigne. Dès les premières minutes du bombardement, de nombreux bâtiments furent détruits par l’artillerie du cuirassé Schleswig-Holstein. Peu après, les Allemands débarquèrent et se heurtèrent à une forte résistance qui les tint en échec. Des bombardements navals et aériens eurent lieu toute la journée mais la résistance polonaise ne céda pas. Il faudra aux Allemands deux semaines de combats pour conquérir ce bastion.
L’attaque par le nord avait pour objectif le couloir de Dantzig. Les Allemands tentèrent de s’emparer de plusieurs ponts intacts. Mais, les Polonais, alertés, parvinrent à les détruire. Ces derniers disposaient dans ce secteur de deux divisions d’infanterie et d’une brigade de cavalerie.
À l’avant-garde de l’offensive se trouvait le 19e Corps d’armée du général Guderian, déployé sur les rives de la Kamionka, dans une zone boisée jugée imprenable par les Polonais. Au début de l’offensive, la 3e panzerdivision entra en Pologne et avança le long de la rivière. Les défenses polonaises furent écrasées et la division atteignit, à midi, la rivière Brahe. Les Allemands capturèrent un pont intact et praticable pour les chars. À la tombée de la nuit, toute la division avait traversé la rivière et se trouvait à moins de 20 km de la Vistule. À gauche de la 3e panzerdivision, la 2e division d’infanterie motorisée rencontra une résistance plus importante. Les Polonais se replièrent lentement, couvert par une compagnie blindée et par le 18e régiment d’uhlans.
À 19h, les éclaireurs de la cavalerie polonaise repérèrent une unité d’artillerie de la 20e division allemande qui profitait d’un moment de répit en plein champ, près de Krojanty. Le colonel Kazimierz Mastalerz, commandant le 18e régiment de cavalerie polonaise, saisit immédiatement l’opportunité et chargea l’ennemi à la tête de deux escadrons de lanciers (200 cavaliers). Les deux escadrons d’uhlans se ruèrent sur les Allemands qui s’enfuirent précipitamment. Les lanciers se jetèrent sur eux et semèrent le chaos et la terreur. Une unité de reconnaissance allemande vint en renfort et les automitrailleuses freinèrent net la cavalerie polonaise. Le colonel Mastalerz fut tué ainsi qu’une vingtaine de lanciers avant que les uhlans n’aient eu le temps de se mettre à l’abri. À la fin de la journée, les pertes du 18e régiment de cavalerie s’élevaient à 40% de son effectif. De cet épisode naquit la légende des lanciers polonais chargeant contre les chars allemands. Mais en réalité, rien de la sorte ne se produisit durant la campagne de Pologne. Le 18e régiment de cavalerie ne fut pas le seul, ce jour-là, à s’illustrer pour son courage et son héroïsme.
Le 1er septembre 1939, à la nuit tombée, les troupes polonaises se retirèrent, laissant la voie libre aux Allemands pour accéder au couloir de Dantzig. Le 2 septembre au matin, la 3e panzerdivision et deux divisions d’infanterie allemande progressèrent rapidement non loin de la Vistule. Elles furent retardées par des contre-attaques ennemies sur leurs flancs. Au matin du 3 septembre, la brigade de cavalerie de Pomorska et la 9e division polonaise étaient partiellement encerclées. Seuls quelques éléments parvinrent à s’échapper, au prix de lourdes pertes. Le même jour, à Bydgoszcz, la population à majorité allemande se souleva contre les soldats polonais provoquant plus de 250 morts. Les Polonais ripostèrent et exécutèrent 200 habitants. Deux jours plus tard, les Allemands s’emparèrent de la ville et exécutèrent 3000 personnes en représailles aux exactions commises par les Polonais sur la population. Le 5 septembre, la base du couloir de Dantzig était coupée. Le 6, les avant-gardes allemandes franchirent la Vistule.
Depuis la Prusse-Orientale, la IIIe armée allemande prit la direction de Varsovie. La panzerdivision Kempf, avec deux divisions d’infanterie, attaqua la position défensive de Mława, principal obstacle de la IIIe armée. Le lendemain, la pression allemande croissante obligea les Polonais à céder du terrain. Mais, Mława résistait encore. Les attaques successives allemandes finirent par obliger les Polonais à se replier. Le 4 septembre, les avants-gardes motorisées allemandes arrivèrent à environ 60 km de Varsovie. Le 6, la panzerdivision Kempf se trouvait à la hauteur de la rivière Narew et s’était emparé de plusieurs ponts à la suite d’attaques surprises. Les Polonais se retirèrent sur la ligne du San, plus à l’est. Les Allemands, encouragés par leurs succès, envisagèrent une grande manoeuvre d’encerclement entre la Vistule et le Bug, retardant ainsi la prise de Varsovie.
Le 2 septembre, les Allemands tentaient toujours de rompre les lignes de défense adverses le long du couloir de Dantzig. De leur côté, les Polonais se repliaient, abandonnant à leur sort les troupes positionnées sur la côte. La forteresse de Tuchola ralentit momentanément la progression allemande, mais, en fin de journée, trois divisions polonaises étaient encerclées. Seule l’une d’elles parvint à s’en sortir. Les deux autres furent anéanties.
Rupture en Silésie et bataille de la Bzura
Le Groupe d’armées Sud du maréchal von Runstedt pénétra en Silésie. En tête, les VIIIe et Xe armées avaient pour objectifs de traverser la ligne de la Warta, forcer le passage entre deux armées polonaises et effectuer une manoeuvre d’encerclement pour se diriger vers Varsovie. Les défenses polonaises étant situées à une trentaine de kilomètres de la frontière, la progression allemande fut d’abord très rapide.
Le général Johannes Blaskowitz, commandant la VIIIe armée, se dirigea rapidement vers Łódź avec le régiment Leibstandarte-SS Adolf Hitler et deux divisions d’infanterie. Le 4, les avant-gardes allemandes atteignirent la Warta, et, deux jours plus tard, la 17e division d’infanterie se trouvait aux alentours de Łódź.
La Xe armée était l’une des plus puissantes armées allemandes. Son objectif était d’atteindre Varsovie en perçant vers le nord-est, juste après la frontière. Pour cela, le 16e Corps, sous les ordres du général Hoepner, devait enfoncer le dispositif polonais entre les armées Łódź et Kraków. Les premiers combats opposèrent la 4e panzerdivision et la brigade de cavalerie Wolynska, défendant Mokra avec le soutien du train blindé Smiagly. Les Polonais infligèrent de lourdes pertes aux Allemands, dont les attaques étaient mal coordonnées. Finalement, les raids des « Stukas » contre les arrière-gardes ennemies désorganisèrent les défenses polonaises.
De son côté, la 1er panzerdivision réussit à enfoncer le système défensif polonais. Dès le premier jour, les 4e et 15e corps d’armée franchirent les lignes polonaises sans grande difficulté. Mais, le deuxième jour, les Polonais ripostèrent violemment à Wieluń. La 4e panzerdivision et la 1er division légère se trouvèrent coincées entre deux divisions d’infanterie polonaises. La 1er panzerdivision et deux divisions d’infanterie encerclèrent une division ennemie et l’intervention de la 2e division légère permit d’améliorer la situation. Le lendemain, les Polonais commencèrent à se replier vers les rives de la Warta. La brigade de cavalerie Krakowska fut anéantie par la 3e division légère.
Cette opération permit d’ouvrir une brèche dans le dispositif défensif polonais. La route vers Varsovie était désormais ouverte. Mais, les Allemands avaient subi de lourdes pertes.
L’armée Poznań, commandée par le général Tadeusz Kutrzeba, se trouvait isolée en Poméranie. Les unités allemandes la menaçaient d’un encerclement total. Conscient du danger, Kutrzeba demanda la permission de se replier ou bien d’attaquer vers le nord. Rydz-Smigly, cherchant à éviter une bataille décisive à l’ouest de la Vistule, refusa.
La 7e division polonaise fut détruite lors d’une attaque convergente menée par trois divisions allemandes. Après de violents combats, la 4e panzerdivision réussit à faire reculer une brigade de cavalerie. La 1er panzerdivision traversa la Warta sur un pont encore intact. Le 4 septembre, la brèche entre les armées Łódź et Kraków était importante. Au prix de lourdes pertes, l’armée Kraków put maintenir son flanc sud grâce au terrain montagneux qui lui permit de réaliser un repli ordonné.
Du 4 au 5 septembre se déroula la bataille de Piotrków. Le maréchal Walther von Reichenau lança ses chars entre Łódź et Kraków afin d’ouvrir définitivement la route de Varsovie. Tandis que la 4e panzerdivision traversait la rivière Pilica, la 1er panzerdivision attaquait la ville de Piotrków. Les unités de reconnaissance allemandes s’engouffrèrent dans une faille du dispositif défensif polonais et encerclèrent les défenseurs. Dans les environs de cette localité eut lieu l’un des rares affrontements entre chars de la campagne. Le 5, les 7TP du 2e bataillon de chars polonais mirent hors de combat 17 chars allemands et 14 véhicules blindés. De son côté, le 2e bataillon ne perdit que deux véhicules.
À la fin de la journée du 5, la route de Varsovie était ouverte. Pris de vitesse par l’avancée allemande et l’inefficacité de ses défenses, le haut-commandement polonais ordonna le repli général vers des positions situées à l’est de la Vistule et de la Dunajec. Les armées Łódź, Kraków et Prusy prirent position à l’est de la Vistule tandis que l’armée Poznań se repliait vers l’est. Au sud, la 2e panzerdivision et la 3e brigade d’infanterie de montagne avaient réussi à vaincre la résistance acharnée de la 10e brigade mécanisée. La route de Cracovie était désormais libre.
La 4e panzerdivision arriva aux alentours de la Varsovie. Le 8 septembre, après avoir prit l’aérodrome d’Okecie, elle attaqua par l’ouest les défenses extérieures récemment installées. Son offensive fut un échec. Les Allemands perdirent environ 60 véhicules blindés dans l’opération. La 4e panzer se retira alors et commença à encercler la capitale.
Informés de la retraite des forces polonaises, les commandants des unités allemandes demandèrent à l’état-major de modifier ses plans car il devenait évident qu’il fallait progresser davantage vers l’est pour encercler et détruire l’ennemi. Mais, craignant une offensive française à l’ouest, von Brauchitsch s’y opposa. Jusqu’au 5, il interdit à von Bock d’avancer plus loin. Ce ne fut que quatre jours plus tard, lorsque l’intention polonaise de se replier pour éviter le siège ne fit plus de doute, que les unités allemandes furent autorisées à reprendre leurs avancées.
Alors que les armées centrales polonaises se repliaient vers la Vistule, les Polonais s’aperçurent que les unités motorisées allemandes les dépassaient par les flancs. Rydz-Smigly voulait à tout prix éviter une bataille à l’ouest de la Vistule. Les Polonais comptaient sur l’intervention de la France et de la Grande-Bretagne qui n’interviendront jamais. L’intervention française se limita à une opération limitée dans la Sarre. Si les Alliés étaient passés à l’attaque, ils n’auraient rencontré qu’une faible résistance car la majeure partie des troupes allemandes se trouvaient à l’est. Ils loupèrent ainsi une occasion unique qui aurait pu modifier le cours de la guerre.
La première semaine de combats avait été décisive. Sur un front totalement détruit, les Allemands multiplièrent les incursions en territoire polonais. Le système défensif adverse fut complétement démantelé. La Luftwaffe avait détruit ses moyens de communication, de sorte que les états-majors se trouvaient isolés les uns des autres ainsi que la plupart de leurs unités. Les Allemands progressaient dangereusement et Varsovie se voyait menacée au nord, au sud et à l’ouest.
Le 7, Rydz-Smigly constitua l’armée Lublin avec les unités de réserve disponibles. Celle-ci avait pour mission de défendre le centre du pays. Rydz-Smigly prit la décision de transférer l’état-major à Brest-Litovsk, estimant que la capitale serait bientôt encerclée. Étant donné le chaos des communications, cette initiative lui fit perdre le peu de contrôle qui lui restait. Le même jour, les avant-gardes motorisées de la 4e division légère allemande traversèrent la Vistule à Szczecin. Allemands et Polonais se livrèrent alors à une course au fleuve, les seconds dans l’intention d’établir une ligne défensive, les premiers pour les en empêcher.
Le 9, un double siège menaçait les troupes polonaises. À l’ouest de la Vistule et de Varsovie, les armées Łódź, Poméranie et Poznań étaient menacées par les IIIe et IVe armées au nord, et les VIIIe et Xe armées au sud. À l’est de la Vistule, grâce à leur progression rapide, les IIIe et XIVe armées allemandes avaient dépassé un grand nombre d’unités polonaises. Le 10, Rydz-Smigly tenta de réorganiser ses forces à l’est de la Vistule. Sans succès.
Alors qu’au nord, la situation se stabilisait – les Allemands réorganisaient leurs forces pour une prochaine offensive –, au centre, elle se détériorait de façon alarmante pour les Polonais. En effet, les avants-gardes allemandes progressaient en masse entre les armées de Łódź et de Prusy.
Le 14, la 10e panzerdivision entra à Brest-Litovsk. Mais, il faudra attendre le 17 et l’arrivée de renforts pour que la citadelle tombe aux mains des Allemands. Après avoir renforcées la ville, la 3e panzerdivision et la 2e division d’infanterie progressèrent en direction de Kobrin tandis que la IIIe armée entrait dans la banlieue de Varsovie.
Au sud, les combats aboutirent à la destruction de l’armée polonaise en retraite. L’une des batailles les plus meurtrières se déroula sur la Bzura, dans le secteur de la VIIIe armée. Après avoir pris Łódź le 8, les 9e et 13e Corps d’armée avancèrent vers le nord-est, tandis que la Xe armée progressait le long de la Bzura, vers Varsovie.
Le général Kutrzeba, commandant l’armée de Poznań, obtint l’autorisation de lancer une contre-attaque le 9. Pour cette attaque, Kutrzeba disposait de trois divisions d’infanterie, des brigades de cavalerie Podolska et Wielkopolska, et de six autres divisions d’appui. Après une journée de combat, la 30e division allemande, attaquée par surprise, commença à se replier. Les Allemands envoyèrent des renforts. von Rundstedt ordonna à la 1ère et à la 4e division de panzers, stationnées dans les environs de Varsovie, de revenir vers l’ouest pour dissuader toute tentative de l’armée Poznań de se frayer un chemin vers la capitale. L’arrivée d’importants renforts ennemis poussa Kutrzeba à interrompre son offensive et à se replier, mais il était trop tard.
Le haut-commandement polonais ordonna à Kutrzeba de foncer vers Radom, afin de se replier vers la Roumanie. Cette tentative se termina par l’encerclement de ses troupes. Les Allemands pilonnèrent, avec leur artillerie et leur aviation, la poche dans laquelle les troupes polonaises étaient encerclées. Ces dernières subirent de lourdes pertes. Elles tentèrent plusieurs fois de se dégager, sans succès. Le 17, dans le secteur de la forêt de Kampinos, les deux brigades de cavalerie et des soldats de deux divisions d’infanterie réussirent à s’échapper. Le reste des unités polonaises fut détruit ou capturé.

La bataille de Varsovie et la jonction germano-soviétique
La Xe armée de von Reichenau atteignit la périphérie de Varsovie dans l’après-midi du 7. La 4e panzerdivision pénétra dans le quartier d’Ochota le 8, avec les 35e et 36e régiments blindés, avançant sur deux lignes parallèles le long des grandes avenues. Mais, les Polonais avaient établi de solides positions défensives. Les Allemands subirent de lourdes pertes. Le lendemain, ils durent parer la contre-offensive polonaise de la Bzura avant de prendre le dessus. Après la défaite polonaise, la ville fut enfin encerclée.
Le 8 septembre, le flanc droit de la Xe armée se dirigea vers Radom. Les Allemands encerclèrent les unités polonaises défendant la ville. Deux jours plus tard, 60 000 soldats polonais se rendirent. Von Reichenau poursuivit sa progression vers l’est. Il traversa la Vistule en plusieurs points, s’empara de Kraśnik, Biłgoraj et Lublin, puis se dirigea vers le San, où son avancée connut un coup d’arrêt le 20, face à l’attaque soviétique. Plus au sud, la XIVe armée avança dans son secteur et assiégea la ville fortifiée de Lvov en se fixant sur la ligne Bug-Lvov-Stryï après l’intervention soviétique.
Le 17, il ne restait que quelques poches de résistance isolées dans le nord du pays. Le 18, le haut-commandement allemand déclara la campagne de Pologne achevée. Cependant, Varsovie continuait le combat.
La bataille de Varsovie se déroula du 8 au 28 septembre. Le 15, les unités du général von Bock attaquèrent la capitale depuis le nord. Sa IIIe armée lança l’offensive sur la rive orientale de la Vistule, dans une banlieue où se déroulèrent de violents combats. Après la bataille de la Bzura, 13 divisions allemandes complétèrent l’encerclement en attaquant les quartiers septentrionaux. Le 20, l’armée Poznań réussit à atteindre la capitale en passant par la forêt de Kampinos. Le 25, soutenus par un millier de pièces d’artillerie et plus de 1200 avions, les Allemands lancèrent une grande offensive sur la capitale. Le lendemain, après avoir écrasés les défenses polonaises concentrées sur les forts de Mokotów, Dobrowski et Czerniakow, au sud de la ville, les Allemands pénétrèrent au coeur de la capitale. Le 27, Varsovie capitulait. La bataille de Varsovie avait fait 40 000 morts parmi la population.
La forteresse de Modlin, situé au confluent du Narew et de la Vistule, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Varsovie, fut attaquée le 12 et capitula le lendemain. Cette forteresse avait supporté et repoussé les attaques répétées de la panzerdivision Kempf et du régiment SS-Deutschland. Gdynia tomba le 14, mais d’autres villes côtières résistèrent jusqu’à la fin. Les dernières unités polonaises se rendirent le 3 octobre à Kock.
Rydz-Smigly, avec une bonne partie du gouvernement, fuit vers la Roumanie. La dernière unité polonaise crédible était l’armée Kraków, qui, après un repli stratégique, prit position entre Lublin et Lvov. Le haut-commandement ordonna la retraite de l’armée vers la Hongrie et la Roumanie. Les Allemands rendirent de plus en plus difficiles ses déplacements. Les Polonais se heurtèrent à une forte résistance et ils finirent par capituler après trois jours de combats.
De son côté, Guderian atteignit Brest-Litovsk, coupant la retraite vers l’est, et fit jonction avec les Soviétiques. Ses unités avaient avancé d’environ 350 kilomètres en 10 jours dans le but d’encercler les restes de l’armée polonaise. La campagne de Pologne était terminée.
L’invasion soviétique
Le 17 septembre 1939, le gouvernement soviétique remit à l’ambassadeur polonais à Moscou un communiqué affirmant sa décision d’envahir la Pologne afin de protéger sa population biélorusse et ukrainienne et de défendre les Polonais de la triste guerre que leurs dirigeants irresponsables avaient provoqué. Cinq jours plus tôt, le journal soviétique Pravda avait publié un article virulent dénonçant l’attitude polonaise envers les minorités nationales de leur pays.
Le haut-commandement soviétique commença à préparer l’invasion de la Pologne quelques jours après la signature du pacte germano-soviétique. Le 6 septembre, la mobilisation générale fut décrétée. Le 15, les troupes soviétiques se concentraient le long de la frontière polonaise, prêtes à attaquer. Elles étaient regroupées sur deux grands fronts, celui de Biélorussie, au nord, celui d’Ukraine, au sud, le long de 1400 kilomètres de frontière.
Le 17 septembre, les troupes soviétiques franchirent la frontière. Les chars avaient pour mission principale de rompre les lignes ennemies et de pénétrer à l’intérieur du pays. L’infanterie devait suivre et consolider le terrain. L’attaque de la Pologne par l’Union soviétique fut une surprise totale. L’état-major polonais fuit dès le lendemain en Roumanie après avoir donné ordre aux troupes polonaises de ne pas engager le combat avec les Soviétiques et de se retirer en Hongrie puis en Roumanie afin de constituer une nouvelle arme capable d’aller combattre sur le sol français.
Trois brigades blindées avaient reçu l’ordre de s’emparer de la ville de Vilnius : la 22e et la 25e par le nord-est et la 6e par le sud-est. La 25e brigade traversa la rivière de Komajka et, le 19 au matin, les véhicules de reconnaissance entrèrent dans Vilnius, après avoir parcourus plus de 300 kilomètres. La 6e brigade se heurta à une forte résistance de la part des gardes-frontières polonais avant de pénétrer dans le secteur de Raków. Le 20 septembre, après avoir franchie la Berezina, elle arriva dans la banlieue de Vilnius.
Vilnius était défendue par huit bataillons d’infanterie, une armée de milice et la 20e batterie anti-chars, sous les ordres du colonel Janiszewski. Le 21 à l’aube, les chars soviétiques pénétrèrent dans la ville par le nord-est et le sud-est. De violents combats éclatèrent. Peu à peu, les poches de résistance les plus coriaces cédèrent. Finalement, à 18 heures, le commandement polonais décréta le cessez-le-feu.
La 22e brigade rencontra, elle aussi, une forte résistance. Le 17 au soir, elle avait pénétré sur plus de 50 kilomètres en territoire polonais. Le lendemain et le surlendemain, elle continua sa progression vers Vilnius, qui avait déjà été prise. Du 20 au 22, la 22e brigade nettoya les environs de la ville, capturant un grand nombre de soldats et de matériel. En six jours, elle parcourut environ 530 kilomètres.
Le 17 septembre, le 15e corps entra en Pologne après quelques escarmouches. Le lendemain, la 27e brigade poursuivit sa progression tandis que sa voisine, la 2e brigade, fut ralentie par la rivière Chtchar, qu’elle réussit à franchir à l’aide de pontons. Le 19, les chars de chaque brigade durent s’arrêter durant toute une journée faute de carburant. Une fois les pleins fait, ils reprirent leur progression et s’emparèrent de Sokółka, le 20. La 27e brigade arriva à Grodno, défendue par environ 3000 soldats polonais.

Le groupe de reconnaissance de la 27e brigade pénétra dans la ville et se heurta à une résistance acharnée. Les Soviétiques subirent de lourdes pertes. Ils capturèrent alors plusieurs enfants à l’Institut de la Charité et les attachèrent aux tourelles des chars. Plus de trois cents enfants de Grodno perdirent la vie durant les premières heures de la bataille. Les combats furent d’une violence inouïe. Le 22, les Soviétiques prirent contrôle de la ville. Plus de 550 Polonais étaient morts et 1600 prisonniers. Les Soviétiques avaient, eux aussi, subi de lourdes pertes.
Une fois la ville conquise, la 2e brigade progressa vers Sopockinie, où s’était regroupé le reste des défenseurs de Grodno avec un régiment d’uhlans. Les environs du village de Sylwanowste furent le théâtre de violents combats. Le général Olszyna-Wilczynski, chef des défenseurs de Grodno, fut capturé et exécuté. Le 23, les restes des 2e et 27e brigades avancèrent vers Suwałki, qu’elles atteignirent le 26.
Après avoir traversée la frontière, la 29e brigade occupa Nieswiez, puis captura deux compagnies d’infanterie polonaise. Elle s’empara ensuite de Baranovitchi et de Kosovo. Le 18 en fin de journée, elle s’arrêta à Domanovo, faute de carburant. La brigade reçut l’ordre d’occuper Brest-Litovsk. Son commandant, le général Semyon Krivoshein, fit accélérer ses chars dans le but d’arriver avant les Allemands. Près de la ville, les Soviétiques rencontrèrent un groupe d’officiers allemands envoyés par Guderian pour les stopper. Krivoshein n’en tint pas compte et pénétra dans la ville, déjà occupée par les Allemands. Guderian, dont le quartier général était installé à l’hôtel de ville, reçut le général soviétique et le félicita d’être arrivé jusque-là. Il lui proposa même d’organiser un défilé commun. Ce denier eut lieu dans l’après-midi.
La 32e brigade entra en Pologne sans difficulté et progressa vers Kobrin. Un certain nombre de ses chars tombèrent en panne, les autres arrivèrent à destination le 22, après avoir parcouru 380 kilomètres. Durant la nuit du 22, des combats eurent lieu dans le secteur de Horodec, où plus de 300 Polonais furent fait prisonniers. Au cours des deux jours qui suivirent, la 32e brigade fut harcelée par des unités polonaises. Le 25, elle forma une ligne défensive dans la région de Kobrin pour bloquer la retraite des troupes polonaises, faisant des centaines de prisonniers le jour même.
La 36e brigade assiégea Doubno le 18 septembre, faisant plus de 6000 prisonniers. Elle atteignit ensuite Loutsk, cinquante kilomètres plus loin, dont les 9000 défenseurs se rendirent immédiatement sans aucune résistance. À la tombée de la nuit, elle parvint à Volodymyr-Volynskyï, où la garnison de 13 500 hommes se rendit le lendemain. Les jours suivants, la 36e brigade continua son avancée vers son objectif final, Lublin. Le 25, elle attaqua Chełm. La ville tomba dans la soirée, faisant plus de 8000 prisonniers. Le 28 septembre, la 36e brigade poursuivit sa progression vers Lublin, où elle rencontra des éléments de la 4e division d’infanterie allemande et dut s’arrêter. Le 5 octobre, elle se retira sur la ligne de démarcation définie dans l’accord germano-soviétique. La brigade avait parcouru au total 710 kilomètres et perdu seulement deux chars.
Les unités blindées de la VIe armée, au total trois brigades, avaient pour objectif Tarnopol et Lvov. La 38e brigade arriva le 17 aux environs de Tarnopol et, deux jours plus tard, entra dans Lvov, 132 kilomètres plus loin. La 24e brigade reçut l’ordre le 17, dans l’après-midi, de franchir la rivière Seret au nord de Tarnopol, afin d’encercler la ville et d’y pénétrer par l’ouest. La ville fut attaquée simultanément par la 24e brigade et par la 10e brigade qui s’était rapprochée par le sud-est. La garnison fut réduite durant la nuit et les Soviétiques s’emparèrent d’un grand nombre de matériel. Le 19 septembre au matin, la 24e brigade se trouvait aux portes de Lvov.
À peine arrivés, les Soviétiques lancèrent une offensive nocturne qui eut raison des positions défensives ennemies. Ils atteignirent ensuite le centre-ville. Deux heures après le début de l’attaque, le commandant de l’unité décida de stopper la progression et d’établir des positions défensives. Au matin, seule l’unité de reconnaissance se trouvait dans la ville. Le reste des troupes s’était retiré vers Winnik.
À 8h30, les unités allemandes pénétrèrent dans la ville. Les chars allemands prirent les véhicules russes pour des Polonais et engagèrent le combat. Les Soviétiques ripostèrent et les Allemands, se rendant compte de leur méprise, cessèrent leurs tirs. Cet incident couta aux Soviétiques deux automitrailleuses, un BT-7 et trois morts. Le 20 septembre, les Soviétiques négocièrent avec les Allemands l’abandon de Lvov par ces derniers, conformément au pacte germano-soviétique. Dans l’après-midi du 20, les Allemands se retirèrent. Mais dans la ville, les combats continuaient. Le 21, l’assaut final commença et Lvov capitula le lendemain.
Le 17 septembre, la 10e brigade détacha deux bataillons de T-28 et une compagnie de reconnaissance de vingt BT pour traverser la frontière par la rivière Zbroutch. L’après-midi, un régiment d’infanterie sur chars entra dans Tarnopol. Le lendemain, cette unité intégra un groupe de combat placé sous le commandement du général Wolocha avec ordre de prendre Lvov. À 17 h, les Soviétiques atteignirent Kozłów. Les jours suivants, avec l’aide d’unités de cavalerie, ils occupèrent des positions à l’ouest de Jaworow.
La 1ère brigade motorisée et la 5e brigade blindée franchirent sans aucune résistance la Zwanczyk, le Zbroutch et la Seret, et parcoururent 60 kilomètres jusqu’à Zydkow, où les Polonais déposèrent les armes après quelques combats. Le 18 septembre, les deux brigades assiégèrent l’aérodrome de Buczacz et s’emparèrent de huit avions. Les Soviétiques poursuivirent leur avance jusqu’à Dobropol, où les Polonais tentèrent de résister mais sans succès. La 4e brigade, quant à elle, entra dans Dobrowoda, où elle fit des centaines de prisonniers. À la fin de la journée, les unités soviétiques avaient capturé une grande partie de la 12e division d’infanterie polonaise, faisant plus de 5000 prisonniers. Le lendemain, les Soviétiques franchirent le Dniestr et capturèrent plus de 2500 hommes et quelques pièces d’artillerie. Ils poursuivirent leur progression sans encombre jusqu’à Kormarno, où ils arrivèrent le 23. Ils furent alors immobilisés par la 2e Gebirgsjäger Division (division de chasseurs alpins).
Le 17, la 26e brigade avança vers Buczacz et Zyznomierz. Elle rencontra une forte résistance des troupes polonaises, fuyant vers la Roumanie. À la fin de la journée, la 26e brigade avait parcouru plus de 70 km et capturé environ 400 hommes. Le 19, elle se heurta à quatre divisions polonaises qui se rendirent après un bref affrontement. Les jours suivants, elle poursuivit sa progression, faisant un grand nombre de prisonniers. Parmi eux, un homme dont l’Histoire retiendra le nom, le général Władysław Anders.
Le 27 septembre, les restes du groupe Operacyjna Kawalerii, commandé par le général Anders, se rapprochaient de la frontière hongroise dans l’intention de reprendre la lutte depuis un autre pays. À proximité de la frontière, dans la localité de Przemyśl, sur un terrain à découvert, ils essuyèrent les tirs de mitrailleuses soviétiques. Les Polonais chargèrent. Alors que la cavalerie était sur le point d’atteindre les lignes soviétiques, les Russes commencèrent à recevoir des renforts sur chaque flanc, dont divers véhicules blindés. Les Polonais écrasèrent la première ligne ennemie, mais les chevaux, épuisés, ne purent aller plus loin. Attaqués de toute part, les Polonais finirent par capituler. Le général Anders fut fait prisonnier. Quelques groupes isolés réussirent cependant à atteindre la Hongrie.
Le premier jour de l’invasion soviétique, la 23e brigade avança le long de la frontière roumaine et parcourut 110 km. Le 18, elle continua à avancer sans rencontrer d’opposition, faisant plus de 11 000 prisonniers. Elle atteignit le Dniestr le 19, après avoir parcouru 120 km en un jour. Le lendemain, après une marche de 140 km, elle fit jonction avec la 5e panzerdivision à Stryï et dut s’arrêter. Les jours suivants, elle s’aventura dans le secteur des Carpates, vers Borysław, où elle fit une fois de plus jonction avec les Allemands et dut interrompre sa progression.
Hitler avait donné l’ordre, dès le 20 septembre, après l’intervention polonaise, de reculer jusqu’à la hauteur de la ligne Pisa-Narew-Vistule-San. Cette limite avait été établie par les accords germano-soviétiques du 23 août 1939. Hitler avait ordonné qu’on évite les combats à l’est de celle-ci. Le retrait allemand commença le 21. Mais, il fut ralenti par le transport des blessés et des véhicules en panne. Les Soviétiques devaient normalement couvrir les Allemands en cas de poche de résistance polonaise, mais ils ne le firent pas et, dans la confusion, de nombreux accrochages eurent lieu entre les deux alliés.
Bilan
Le 6 octobre, la campagne de Pologne était déclarée officiellement terminée. Les pertes allemandes, selon leur estimation d’octobre 1939, s’élevaient à 8082 tués, 27 279 blessés et 5029 disparus, bien que les pertes réelles eussent été plus élevées. De nombreux chars allemands étaient endommagés et 217 détruits. La Luftwaffe avait perdu 25% de ses appareils – 285 détruits et 279 irrécupérables. Les Soviétiques avaient occupé le territoire polonais prévu par l’accord du 23 août en un peu plus de dix jours. L’ensemble de la campagne leur avait couté environ 10 000 hommes, 42 chars de combat détruits, 429 endommagés et 30 avions abattus. De son côté, l’armée polonaise comptait 266 000 tués et blessés, ainsi que 700 000 prisonniers.
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